Histoire de la Ville de Niort :
Etrait de la conception mythologique des dragons que l'on s'en faisait au XIXème siècle par M. Jouyneau Desloges, membre de l'Académie celtique, 1810, t. V.
Poitiers, 26 novembre 1809.
Notice sur le monument et la fable du dragon de Niort, extraite d'une dissertation de M. d'Orfeuille, sur l'existence des dragons.
Par Eloi Johanneau, tome V de l'Académie celtique.
"Cet extrait était rédigé quand j'ai reçu la lettre de M. Jouyneau Desloges, insérée page 51 de ce Numéro, dans laquelle il est déjà question de ce même dragon. Quoique ce savant confrère ait puisé à la même source que moi, et que je lui en doive même la communication, je n'ai pas cru devoir supprimer mon extrait, parce qu'il est plus étendu que le sien, et que je l'ai accompagné de réflexions qui me sont particulières; qu'en outre, j'ai été obligé, pour le composer, de rapprocher et mettre en ordre tous les renseignements que j'ai trouvés épars dans la prose, les vers et les notes de M. d'Orfeuille, car cette dissertation est en prose et en vers. Elle a été imprimée à Saint-Maixent, en l'an 7.
Si cette dissertation ne traitait que du sujet annoncé dans le titre, on sent bien que je ne perdrais pas mon temps à en faire l'extrait; attendu que personne ne croit plus à la réalité de l'existence des dragons, et que je suis persuadé, en particulier, que les fables qu'on en raconte et les cérémonies religieuses qui en sont la suite, ne sont que des allégories astronomiques qu'on retrouve dans les mythologies de tous les peuples. Mais il est aussi question, dans la dissertation de M. d'Orfeuille, d'un monument élevé, à Niort, à un guerrier vainqueur d'un dragon; et c'est même ce monument qui a donné lieu à la dissertation et à l'opinion que l'auteur y défend. Je me bornerai donc, dans cet extrait, à faire connaître ce monument singulier et la fable ancienne qui l'aura fait ériger, dans les temps postérieurs, après avoir été regardée et crue sans doute comme une histoire véritable, étant appuyée sur la tradition d'une cité toute entière.
M. d'Orfeuille commence sa dissertation par nous apprendre qu'en se promenant, en 1788, sur le cimetière de l'hôpital général de Niort, et y considérant les tombeaux qui s'y trouvaient épars, il en vit un qui lui parut devoir fixer particulièrement son attention; que les figures qu'il y remarqua, les inscriptions qu'il y découvrit, lui apprirent bientôt par quel motif on l'avait élevé autrefois; que le fait lui parut extraordinaire; mais qu'il eut la négligence de ne prendre copie d'aucune des inscriptions; qu'elles le frappèrent cependant à un tel point, qu'il ne les a pas encore oubliées entièrement (il écrivait en l'an 7); qu'en repassant au même endroit, en 1792, il vit avec surprise que ce monument qui lui semblait mériter d'être soigneusement conservé, était presque entièrement détruit; qu'il ne restait plus alors que le couvercle du mausolée, et que même il avait été transporté à quelques pas de la place où il l'avait vu d'abord; que depuis cette époque, il n'a pu s'empêcher de faire des réflexions sur ce monument singulier; qu'ayant cru y trouver la preuve de l'existence des dragons, cela l'avait engagé alors à faire des recherches pour la confirmer et pour recueillir, dans la mémoire de ses concitoyens, toutes les preuves que ce monument pouvait lui fournir de l'existence du dragon de Niort, et qu'il aurait pu avoir oubliées. M. d'Orfeuille, comme on voit, est bien persuadé de l'existence de ce dragon; et en effet, si nous n(étions pas aussi instruit que nous le sommes aujourd'hui en histoire naturelle, il serait difficile de nier un monument dont la tradition, conservée jusqu'à nos jours dans la mémoire de tous les habitants d'une cité, est confirmée par un monument sépulcral placé dans un cimetière public, et exposé à la vue de tout le monde.
Mais aucune tradition, aucun monument, ne pourront jamais faire croire qu'il a existé des monstres tels que le dragon de Niort et le serpent Python.
Voici, au reste, la description de ce monument, faite en grande partie d'après la gravure que M. d'Orfeuille a jointe à sa dissertation. Sur la pierre tombale qui recouvrait le mausolée, on voit représenté un guerrier couvert d'une cuirasse et d'une cotte d'armes. A côté de lui et à sa gauche, est un serpent ailé couvert d'écailles, droit sur sa queue, lequel s'élève au dessus du guerrier et semble lui lancer le venin dont ses joues sont pleines. On lisait encore, il y a dix ans, à un des bouts du mausolée, l'épitaphe suivante :
SISTE VIATOR,
REM HABES PAUCIS:
HI PERIERE SIMUL.
c'est-à-dire,
Arrête-toi, voyageur, voici le fait en peu de mots : ils ont péri ensemble.
Sur un des côtés était, en langue latine, le nom du guerrier, l'époque et les circonstances de cette tragique aventure, avec cette autre inscription :
HOMO OCCUBUIT SERPENTIS VENENO.
L'homme a péri par le venin du serpent.
En supposant que la figure du personnage sculptée sur le couvercle du tombeau, soit dans une proportion naturelle, le guerrier devait avoir environ 5 pieds 2 pouces de haut, et le serpent 10 pieds de long.
Voici maintenant comme la tradition explique ce monument, et raconte l'événement qui l'a fait ériger :
Un soldat avait été condamné à mort pour crime de désertion; il apprit qu'à Niort, sa patrie, un énorme serpent faisait depuis trois mois des ravages, et qu'on promettait une grande récompense à celui qui pourrait en délivrer la contrée. Ce guerrier se présente; on l'admet à combattre le monstre, et on lui promet de lui accorder sa grâce s'il parvient à le détruire. Couvert d'un masque de verre et armé de toutes pièces, l'intrépide soldat va à l'antre obscur où se tient le monstre ailé qu'il trouve endormi. Réveillé par une première blessure, il se lève, prend son essor et vole contre l'agresseur. Tous les spectateurs effrayés se retirent, lui seul reste et l'attend de pied ferme. Le dragon tombe sur lui et le terrasse de son poids; mais au moment qu'il ouvre la gueule pour le dévorer, le soldat saisit cet instant pour lui enfoncer son poignard dans la gorge. Le monstre tombe à ses pieds. Notre brave guerrier allait recueillir les fruits de sa victoire, lorsque poussé par une fatale curiosité, il ôtât son masque pour considérer à son aise le redoutable ennemi dont il venait de triompher. Déjà il en avait fait le tour, quand le monstre blessé mortellement et nageant dans son sang, recueille des forces qui paraissaient épuisées, s'élance subitement au cou de son vainqueur, et lui communique un venin si malfaisant, que ce brave guerrier périt au milieu de son triomphe.
Parmi les nombreuses histoire de dragons que M. d'Orfeuille cite à l'appui de son opinion sur la réalité du dragon de Niort, il en est une qui mérite plus d'attention que les autres, c'est celle du dragon du village de Torcy, près Lunéville, que Dom Calmet, dans sa lettre sur les dragons (voyez le Journal de Verdun, du mois de Juin 1751, page 430), prétend avoir été tué ers le commencement du siècle dernier, et dont on voyait encore, il y a environ 60 ans, un tombeau élevé en mémoire de cet événement, sur lequel était la figure d'un dragon. Mais ce monument, ainsi que celui de Niort, ne prouve pas plus la réalité du fait, que les tombeaux des dieux égyptiens, grecs et romains, ne prouvaient la réalité de l'existence de ces dieux sur la terre. Tous ces monuments ne prouvent que la crédulité des peuples, qui, après un long laps de siècles, ont fini par regarder des allégories comme des histoires, et des personnages fabuleux comme des personnages historiques. Je pense donc qu'on peut admettre les dates, quoiqu'un peu trop récentes peut-être, assignées au monument du dragon de Torcy et à celui de Niort; mais je ne peux croire à celles fixées pour l'événement, puisqu'il n'a jamais eu lieu qu'en allégorie; que toutes les allégories appartiennent à des religions bien anciennes, et que celles de nos contrées en particulier, sont de l'invention des druides. Le seul nom d'Alloneau qui signifie en celtique le vainqueur de la bête, comme je l'ai déjà remarqué dans une note sur la lettre de M. Jouyneau Desloges, me persuade que la victoire qu'on lui attribue, est une victoire allégorique, comme celle d'Apollon Pythius, vainqueur du serpent Python, que la fable en est au moins aussi ancienne. Je pourrais le prouver; mais comme le but de l'Académie n'est pas d'expliquer les fables, mais de se borner à les recueillir, je termine ici cette Notice, en invitant tous les savants qui en connaissent de semblables, de vouloir bien les recueillir et nous les communiquer.
Quoique ce soit des fables ou des traditions fabuleuses, que le peuple seul les raconte et y croit encore, elles n'en méritent pas moins l'attention et la curiosité d'un antiquaire philosophe, puisqu'il est certain qu'elles appartiennent à la mythologie de nos ancêtres. Quand elles auront été recueillies et expliquées, nous reconnaîtrons alors qu'il ne leur a manqué que d'être chantées par des poètes anciens, comme l'ont été les fables des Grecs et des Romains, pour nous intéresser plutôt.
Eloi Johanneau."
Arrêt de la Cour des Aydes : Confirmation de la Lettre patente de 1610 sous la régence de Marie de Médicis,
Lettre de création d’un régiment royal de la ville de Nyort par Louis XIII le 16 juin 1621,
Arrêt du Conseil du Roy Louis XIV portant sur la réduction des échevins et officiers de la ville de Nyort le 18 juillet 1681,
Mythe du dragon de Nyort par M. D’Orfeuille, Saint Maixent an 7 de la République,
Parallèles entre le dragon de Niort et l’Hydre de Lerne, symbolisme des Hercules de la ville de Niort,
Etude sur les Poulpes, calamars, pieuvres et Hydres mythiques
Récit des opérations militaires en Bas Poitou durant les guerres de religions 1562-1622 (archives nationales de l’armée de terre),
Situation générale en Bas Poitou au XVIIème siècle,
Effets de la Révocation de l’Edit de Nantes ou Edit de Fontainebleau 1685,
Bref historique de la ville de Niort,
Chartes originales de la ville de Nyort, par Aliènor d’Aquitaine en 1203 et confirmées par ses successeurs,
Lettre patente de confirmation des privilèges par le roi Louis XIII, au Maire, échevins et pairs de la Ville de Nyort en 1610,
D’Assailly